Débuter en BDSM : témoignages

Débuter en BDSM : témoignages (Partie 1)

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On peut souvent lire des témoignages de personnes qui pratiquent le BDSM depuis un moment. J’ai décidé de m’intéresser au point de vue des débutants. Pourquoi a-t-on envie de débuter en BDSM ?

J’ai donc demandé à des personnes attirées par le BDSM, mais n’ayant que peu (ou pas) d’expérience, de parler de leurs envies, en répondant à quelques questions. Les gens ont été sympas et se sont prêtés au jeu. Leurs réponses sont variées, et très loin des clichés. Je n’ai pas voulu raccourcir les propos de chacun. Cet article se déroulera donc en plusieurs parties.

Débuter en BDSM : témoignages

Dans cette première partie, nous allons découvrir ce qu’en pense Cheyenne.

Cheyenne se définit comme étant “gender fluid”. Elle navigue entre les deux genres, mais, même en homme, conserve une part de féminité. Dans le BDSM, elle aimerait trouver une confidente, une partenaire de jeux, qui la guide de manière ludique dans la réalisation de ses envies.

L’envie de débuter en BDSM

1Pourquoi le BDSM vous attire-t-il ?

Ça viendrait peut-être plutôt en dernier comme question pour moi. Disons que j’y suis venu parce que j’avais pris un chemin qui passait par là, mais ça n’a jamais été une recherche, ou le but précis du voyage.

Débuter en BDSM : naissance de l’idée

2Comment l’idée de débuter en BDSM est-elle née dans votre esprit ?

Diverses images, éducation, culture à l’origine si on remonte assez loin dans l’enfance, sans avoir aucune connaissance du milieu et sans pouvoir mettre un nom dessus.

D’abord une éducation ou il fallait être fort, ne jamais se plaindre, savoir “encaisser” comme on dit. Un certain challenge à savoir souffrir en silence, à être l’enfant qui ne pleure jamais à l’école, à être celui qui va encaisser un vilain tacle par derrière et se relever de suite pour continuer à jouer au foot… J’ai très vite appris à surmonter, et même apprivoiser la douleur. Physique ou psychologique.

La confiance réciproque avant de débuter en BDSM

Mais ma première véritable approche avec le BDSM a été au moment de construire des relations. Une chose dont je manquais cruellement s’est finalement imposée à moi dans ce genre de relations quand j’en ai entendu parler à la télé à l’adolescence : la confiance…

C’était effroyablement paradoxal pour moi, de se faire mal dans un couple, de se laisser faire, de se donner littéralement. Moi qui ne me laissais jamais marcher sur le pied, moi qui rendais coup pour coup, moi qui n’accordais jamais réellement ma confiance… De voir deux êtres se donner l’un à l’autre comme ça, la confiance qu’évidement doit donner une soumise à sa Maîtresse, mais aussi que la Maîtresse doit donner à une soumise.

Cette confiance réciproque me semble bien souvent sous-estimée de nos jours dans ce que je peux voir. Car c’est un échange, et la soumise a tout autant son rôle à jouer, aussi important, pour “casser” les conventions, et doit dire ou exprimer à sa Maitresse : “Vas y, fais moi confiance, je vais endurer, je ne t’en voudrai pas.”

Le don de soi

C’est cette symbiose dans les rapports humains qui m’a tout de suite séduite. Alors que j’avais grandi dans un monde ou chacun joue à manipuler l’autre pour arriver à ses fins égoïstes, un jeu dans lequel on m’avait placée sans la moindre connaissance des règles, un jeu qui m’avait cruellement déçue quand j’ai découvert la vérité. Je n’étais qu’un pion parmi les autres.

Et là, paradoxalement, dans une relation où je m’imaginais, soumise, me donner entièrement, ça m’a sauté à la figure comme j’avais été idiote de ne pas le voir plus tôt. C’est par ce don de soi, par cette acceptation d’une autre, que l’on peut être vraiment “reconnue” en tant qu’être humain, libre de ses choix, libre d’en faire don. Et cette reconnaissance va de pair avec une personne, avec qui la confiance est réciproque et totale, qui va accepter et faire fructifier ce don. Ainsi, la relation aura pour but de grandir les deux personnes, dans une parfaite osmose, de toute beauté, de toute pureté. Purifiée des mensonges et des manipulations perverses du “monde d’en bas”. Ici, tout est franc, qu’on donne ou qu’on reçoive, chacun est égal, et on le fait en toute conscience et en toute sincérité.

Attirance pour certains aspects du BDSM

3Le BDSM comporte un ensemble de pratique assez vaste, et peut être perçu selon divers angles… Quel est l’aspect qui vous attire le plus ? Quelles sont vos envies en la matière ?

Comme dit plus haut, ce qui me “plaît” (je mets entre guillemets car ce mot me semble bien en dessous) c’est l’échange, la confiance et la conscience de soi, et de l’autre. La reconnaissance de deux être humains, non pas pour se servir de l’autre pour arriver à ses fins, mais pour atteindre un but commun ensemble.

L’élévation commune

Pour le reste, ce qui plaît ou attire, comme on dit : les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas ! C’est accessoire, ce qui compte c’est de trouver la bonne personne qui partage les mêmes attirances. Le but est l’élévation commune, il suffit de trouver la personne qui désire y arriver en usant des mêmes “outils”.

Débuter en BDSM : témoignages

Prêter son corps

D’un point de vue personnel et absolument subjectif :

Mon premier attrait a donc été cérébral, sur le don de soi. Je n’y connaissais encore rien, et mon seul exemple avait été le masochisme. Pratique sur laquelle j’avais donc instinctivement transféré mes fantasmes.

Puis, 18 ans, première ligne internet, et j’ai commencé à fouiller. Jusqu’à tomber sur la féminisation. Je comprenais le mot, mais je ne comprenais pas les pratiques, ni les images, parfois dégueulasses, sur lesquelles je tombais.

Dans ma recherche de moi-même, je savais déjà que j’avais une part de féminité. Je commençais à peine à l’assumer pour moi-même, mais n’étais absolument pas prête à l’assumer en dehors du cadre privé. Par la féminisation, je voyais le moyen de prêter mon corps, comme une poupée, à une personne qui aimerait et arriverait à exploiter cette féminité.  Une moyen de m’offrir et de m’engager à explorer cette voie, d’être guidée par une femme à qui je plairais si j’étais une femme aussi.

Avec internet, on tombe souvent de haut

Malheureusement, avec internet, on tombe souvent de haut. Toute cette image idyllique que je m’étais construite du BDSM, et je tombe sur des mecs poilus qui ne faisaient aucun effort, en culotte et en bas et appelaient ça la féminisation. C’était volontairement moche, parce que ces mecs recherchaient l’humiliation. Alors que “merde quoi !”, en quoi c’est humiliant pour une homme de vouloir être une belle femme ?

Il n’y avait aucun échange là-dedans, aucune recherche de l’élévation, juste de la dégradation qui s’appuyait sur tous les préjugés que je m’efforçais tant de fuir.

Et je tombe sur des images “choc”, “commerciales”, juste pour attirer du monde sur des sites payants. Les dominatrices n’en étaient pas, juste des actrices posant pour des photos pour des sites qui ne jouent que sur les préjugés de futurs clients… Pas d’échange, pas de confiance ni la moindre conscience. Pas d’élévation dans ces choses, juste du business.

Bien déçue et de plus en plus repliée sur moi-même, j’ai gardé ça pour moi pendant des années, abreuvant mon imaginaire d’images gratuites trouvées sur le net de temps en temps… Mais en gardant mes distances, en gardant mon utopie pour moi.

Guidée, mais pas commandée

J’explorais aussi ma féminité en même temps. Je commençais à en parler, poster sur des forum de nanas, et j’ai trouvé une Amie sur un de ces forums. Elle qui a tout de suite accepté et encouragé ma féminité. Elle qui avait des penchant Dominatrice mais qui m’a poussée sans jamais m’imposer ses idées. Elle qui a su me faire comprendre que pour donner quelque chose, il fallait que je m’en empare d’abord, que je l’assume pleinement pour moi-même avant de pouvoir l’offrir.

Un petit pas pour l’homme, un pas de géant pour mon moi.

Et voilà d’où viennent mes première photos, où j’étais enfin l’actrice. Quelques menottes, collier, laisse etc… De la lingerie, des fringues sexy. J’étais guidée, mais pas commandée, et débuter en BDSM ainsi a été une révélation pour moi. J’avais enfin trouvé une personne avec qui partager ça et encore aujourd’hui à qui je dois énormément.

Nos chemins se sont séparés, mais je garderai toujours une certaines tendresse pour elle, même si elle n’a peut être pas conscience de tout ce qu’elle à fait pour moi. Avant de pouvoir m’élever, c’est d’abord elle qui m’a sortie du trou. Et tout ça dans un cadre amical et ludique, de confiance et d’échanges, voilà ce qui m’attire.

BDSM soft ou hard ?

4Plutôt soft ou plutôt hard ? D’ailleurs, quelle est votre définition de ces deux termes ?

Ça tombe bien comme transition. Alors d’après ma réponse précédente : plutôt soft. Il faut que ça reste dans un cadre ludique, que la Dominante soit aussi une amie, une confidente, une guide.

Pour moi la différence entre les deux, la Dominatrice soft va pousser, tandis que la Dominatrice hard, elle, va tirer. Ce n’est pas tellement une histoire d’aller plus où moins loin dans une pratique, mais plutôt une question de limites. Le soft va aider à les repousser, le hard va les enfoncer.

Adepte de la sécurité

Je comprends que le coté hard soit attirant et plaisant. Mais pour moi, cela reste du domaine du fantasme à ne pas réaliser, d’un point de vue sécuritaire, pour l’équilibre psychique des deux personnes d’ailleurs.

C’est un peu comme rouler à 110 sur une route limité à 90. On prend des risques non pas proportionnels, mais exponentiels, pour au final arriver à peine quelques secondes avant la personne qui roulera à la vitesse limite. Je suis plus adepte de la sécurité. Mon but est d’arriver à bon port, pas de rechercher la plus grosse décharge d’adrénaline possible en chemin.

Chacun son truc. James Dean aurait pu encore faire beaucoup de grandes choses s’il n’avait pas eu son accident… Mais James Dean aurait-il vraiment été James Dean s’il n’avait pas eut cet accident ?

Débuter en BDSM : fantasme ou réel ?

5Pensez-vous que débuter en BDSM restera dans le domaine du fantasme, ou passerez-vous à la pratique ?

J’ai déjà eu un peu de pratique.

Car même si on peut dire du point de vue de certains que ce n’était que du jeu, que c’était ludique, “gentillet”, ce qui compte pour moi, c’est d’avoir vécu un moment qui m’a fait grandir, évoluer, et ça, ça n’est pas anodin.

Une Dominatrice n’a pas besoin de taper plus fort, d’être plus sévère,  plus cruelle, plus exigeante… Ce n’est pas une compétition. Tout ça je pense, c’est de l’habillage, de la mise en scène. Seul ce que vivent et en retiennent les participants importe et peu importe le moyen d’y arriver.

Repasser à la pratique ? Je l’espère bien.

Mais j’ai des idées bien arrêtées sur la pratique et tout ce qui l’entoure. Et même toute une idéologie (ou une “idéo-logique”) qui doit venir obligatoirement avec ce genre d’échanges. Ce qui fait que je suis très sélective. J’attends beaucoup et je cherche avant tout, au milieu d’une foule de gens qui cherchent à assouvir des fantasmes “primaires” avec n’importe qui, la personne avec qui m’imbriquer parfaitement.

 

 

Un grand merci à Cheyenne pour avoir pris le temps de répondre à mes questions.

 

La suite de cette série d’interviews :

 

Illustrations : galeries Flickr de Leonardo Sardinha et de Timothy Wells, Creative Commons.

 

Collectionneuse compulsive de sextoys, testeuse pointilleuse et exhibitionniste débutante.

6 réflexions sur “Débuter en BDSM : témoignages (Partie 1)”

  1. Je lis ceci au point 3 “Malheureusement, avec internet, on tombe souvent de haut. Toute cette image idyllique que je m’étais construite du BDSM, et je tombe sur des mecs poilus qui ne faisaient aucun effort, en culotte et en bas et appelaient ça la féminisation, c’était volontairement moche parce que ces mecs recherchaient l’humiliation, alors que “merde quoi !”, en quoi c’est humiliant pour une homme de vouloir être une belle femme ?”

    Moi aussi je trouve quand dans le domaine du BDSM il y a des gens qui ne soignent pas leur look.

    Personnellement je tente de garder la forme, je ne bois ni ne fume, entre deux séances je fais un peu de gym à mon espalier ou des tractions à mon trapèze, je me douche si j’ai transpiré. Mes vêtements sont propres et mes accessoires aussi.

    Parfois quand je vois la classe et le standing de certain(e)s de mes esclaves (secrétaire, cadre, touriste, couples sympa en découverte du SM, copains qui offrent un anniversaire original, etc…), je me dis que j’ai raison de rester hyper-correct.

    je sais, hélas, qu’il y a des gens pas du tout dans cette ligne là…

    GC

  2. Dans le domaine des rencontres sur internet (et pas seulement dans le BDSM), j’ai l’impression qu’il existe des personnes qui “oublient” qu’elles ont affaire à des être humains à l’autre bout de la connexion, et que leur interlocuteur(trice) a aussi des attentes, des critères et des fantasmes.

    Parfois ça donne des malpolis, parfois des zizis qui vous fixent droit dans les yeux alors que vous vous attendiez à parler à quelqu’un… On ne choisit pas son physique, mais le look ultra-bâclé, c’est une version gentille de la chose.

    1. Oui, Elle, je suis d’accord. Je ne peux pas répondre en ce qui concerne le SM virtuel (car je ne le pratique pas), mais bien le réel. Contigu au vestiaire de ma salle/donjon, j’ai mis une douche + lavabo + grand miroir. Et pas seulement pour que les soum’ puissent se laver après la séance sado-maso (transpiration), mais parfois aussi avant.

      Bien que je sois clair au téléphone lors de la prise de rendez-vous, bien que les concierges d’hôtels expliquent aux gens intéressés que je suis quelqu’un plutôt classe, il y a (ils sont minoritaires) des gens pas propres qui viennent au rendez-vous. Dans ce cas je leur demande de se laver.

      S’ils ne veulent pas “perdre de temps à se doucher” mais veulent la séance tout de suite, je ne refuse pas (comment pourrais-je leur imposer de se laver). Dans ce cas, tant pis pour eux, mais cette attitude me donne alors une bonne raison de plus de me laisser complètement aller à mes plaisirs sadiques. Mais peut-être était-ce chez eux leur désir caché : me provoquer. Dans ce cas c’est moi qui suis manipulé…

      GC

  3. Ah ouais, quand même ! C’est un sacré manque de respect… Et pas dans le sens “soumission envers le maître dans le cadre d’un rapport de soumission-domination”, mais en matière de simple civilité élémentaire… Parce que bon, ne pas aimer se laver, c’est une chose, mais imposer cela à quelqu’un avec qui on s’apprête à avoir une activité physique (qu’il s’agisse de lutte gréco-romaine, d’une visite médicale ou de SM ;-) ), c’en est une autre.

    Quelques hypothèse en vrac :
    – Ils considèrent que vu qu’ils ont payé, ils n’ont pas à faire d’efforts supplémentaires ?
    – Ils ont envie de se faire punir pour leur insolence hygiénique, comme vous le supposez ?
    – Ils ont peur de l’eau ?

    1. Peur de l’eau ? lol, ah non, je ne crois pas…

      Se faire punir pour leur insolence ? Cela doit être plutôt rare des esclaves qui pensent comme ça (bon allons savoir…)

      Non, je pense qu’il y a des gens pas très propres derrière leurs vêtements.

      L’explication que je pense la plus plausible est “je vais me faire attacher, frapper, malmener par un type habillé en pantalon noir et hautes bottes ? C’est le régime “camp de rééducation” alors j’y vais comme je suis.
      Dans ce dernier cas, l’esclave me demande rarement la carte SD de la séance. Et s’il la demande, à mon avis c’est pour “en avoir pour son argent”.

      Ce qui me déplaît le plus c’est de devoir nettoyer davantage mes accessoires parce que je n’ai pas insisté sur la douche.

      Les gens les plus propres sont le maître et son (sa) soumis(e) ou les couples.

      GC

      1. “Ce qui me déplaît le plus c’est de devoir nettoyer davantage mes accessoires parce que je n’ai pas insisté sur la douche.”

        En effet…. D’autant plus que le cuir est loin d’être un matériau que l’on pourrait qualifier de “facile à laver”…

        (Ce qui me fait penser, d’ailleurs, que ça pourrait être sympa, à l’occasion, de faire un post sur le nettoyage des accessoires érotiques ou BDSM)

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